Ayez Confiance en la Pleine Conscience

Le stress et l’anxiété sont des ennemis redoutables, surtout lorsqu’ils s’installent de manière chronique. Les dégâts qu’il provoquent aux niveaux cellulaire, physiologique, psychologique et sociétal, sont extrêmement délétères. C’est prouvé!

Les chirurgiens-dentistes, nous l’avons vu, sont loins, bien loins, d’être épargnés. Notre profession prétend d’ailleurs que le taux de suicide en son sein est deux fois supérieur à la moyenne générale. Certes, d’autres professions comme les policiers, les pompiers… prétendent exactement la même chose. Mais une chose est sûre : on observe deux fois plus de comportements addictifs chez les professions libérales (médecins, avocats…)

Mais pourquoi tant de stress chez les chirurgiens-dentistes?

LES ATTAQUES PERSONNELLES

Prenons un exemple concret : vous vous apprêtez à recevoir un nouveau patient. Vous aimez ce moment particulier où vous allez faire une nouvelle rencontre et montrer à quel point vous êtes un remarquable professionnel. Vous vous avancez, guilleret, vers la salle d’attente, vous affichez votre plus beau et spontané sourire et lancez un « ravi de faire votre connaissance »… et les premiers mots que vous adressent votre interlocuteur sont : « Je déteste les dentistes!« 

La première fois on est un peu surpris et on ne sait pas trop quoi dire. Mais après 20 ou 30 ans de carrière : ça peut devenir démoralisant. On peut même être tenté d’assener une punchline désobligeante en retour, du style : « Et bien, tu ne feras pas partie de mon fan-club c***ard! »
Mais non, c’est une mauvaise idée en fait.

La solution est beaucoup plus simple : ne pas le prendre comme une attaque personnelle. En faisant preuve d’un peu de recul, vous réaliserez que ce n’est en rien une attaque contre votre personne. Si vous faites preuve de compassion et d’empathie, alors vous comprendrez que ce qu’exprime votre patient : c’est SA peur d’aller chez le dentiste. Et si vous écoutez encore plus attentivement, vous comprendrez les causes cette peur dans l’histoire personnelle du patient. Une occasion parfaite de vous différencier des autres cabinets!

FIXER DES ATTENTES RÉALISTES

Mais le problème des chirurgiens-dentistes est qu’on s’attend généralement à ce qu’ils soient consciencieux et appliqués dans leur travail. Or certains d’entre nous sont des perfectionnistes, voire des ultra-perfectionnistes. Nous avons vu dans un précédent article que cela pouvait devenir un sérieux problème.

Par exemple : vous vous excitez parce que le point de contact du composite que vous venez de réaliser n’est pas parfait et vous décider de refaire l’intégralité du travail alors que le patient ne se brosse même pas les dents, fume 25 cigarettes par jour et descend 1,5L de soda par jour.
Non, non et non!

Car une des choses les plus importantes en médecine et que paradoxalement les praticiens ont tendance à oublier est que le patient peut très souvent plus pour lui même que le médecin ne peut pour lui. La croyance en une médecine omnisciente et totipotente est une distorsion cognitive fréquente chez les patients mais aussi chez les praticiens et que l’on retrouve dans le syndrome du sauveur.

Mais une autre cause à l’origine du stress des chirurgiens-dentiste est qu’ils oublient souvent de faire une chose pourtant essentielle : atténuer les attentes des patients. Surtout à une époque où ces derniers n’ont jamais été aussi exigeants.

Exemple : « Ne vous inquiétez pas Mme Michu, je vais vous faire un implant pour remplacer votre incisive centrale et on ne verra pas la différence avec les autres dents. »

Cher Docteur, aussi talentueux que vous puissiez être, afficher autant de confiance en soi s’appelle du suicide, surtout quand on à pleinement conscience de la difficulté extrême de l’implantologie du secteur antérieur. Si votre patiente n’est pas satisfaite du résultat, ne cherchez pas uniquement des raisons dans sa personnalité difficile, mais peut être aussi dans la manière dont vous parlez à vos patients.

Idem lorsque vous faites une traitement endodontique : mieux vaut prévenir le patient, avant les soins, du risque de douleurs ou de complications post-opératoires. Deux avantages : en cas de sensibilité post-opératoire, le patient se tranquillisera d’autant plus que vous l’aurez prévenu; et si tout se passe bien, vous passerez pour un héros à ses yeux!

Idem pour les prothèse amovibles complètes. Les études montrent que l’efficacité masticatoire des patients équipés de PAC atteint, au mieux, 25% de celle d’un sujet denté. Le patient doit donc prendre conscience (et c’est votre rôle) que ce type de prothèse s’apparente à une jambe de bois qui permet certes d’aller d’un point A à un point B, mais certainement pas de faire de la danse hip-hop!

RE – LA – TI – VI – SER

Relativiser les attentes des uns et des autres, plutôt que de nous mettre des tonnes de pression sur les épaules à chaque procédure de soin, nous permet de faire comprendre à nos patients comment ils peuvent s’aider eux-mêmes et supporter une part plus large de leur condition.

Malheureusement, l’intelligence émotionnelle n’est toujours pas enseignée dans les écoles de médecine. Pas plus que la méditation qui est un excellent moyen pour mieux gérer le stress des praticiens. Ce sont pourtant deux capacités du cerveau à fonctionner plus efficacement avec moins de ressources.

La pleine conscience est la réflexion qui permet de volontairement changer les référentiels et les schémas de pensée que le cerveau a programmé dans notre esprit, le plus souvent de manière inconsciente. S’établissent alors de nouveaux rapports à soi, aux autres et à son environnement permettant de mieux répartir les lourdes charges émotionnelles qui pèsent sur nos frêles existences.


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4 commentaires sur “Ayez Confiance en la Pleine Conscience”

  1. Florence Etcheverry

    Merci, ça fait un bien fou de lire ton article de bon matin !
    Dans le même registre j’en profite pour conseiller à tous, la lecture du livre d’Albert Moukheiber, docteur en neurosciences et psychologue, « votre cerveau vous joue des tours « . Il y explique de manière très simple et illustrée les biais et mécanismes archaïques de notre cerveau qui se mettent en place initialement pour assurer notre survie mais qui bien souvent nous induisent en erreur….
    Un podcast également que j’ai découvert tout récemment, Emotions, de Louie Média qui décrypte chacune des émotions que l’on peut ressentir, avec à chaque épisode 3-4 interviews qui viennent éclairer le raisonnement … Tout simplement passionnant !!!
    Prenez soin de vous et bon courage !

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    • thedentalist

      Merci Florence pour ces références qui confirment que notre pire ennemi est peut être en nous-mêmes. En tous cas, il apparait clairement dans des recherches récentes que plus un individu (et ce d’autant plus qu’il est jeune) est capable de décrire verbalement les émotions qu’ils ressent et d’en faire une discrimination fine, plus il est capable de les surmonter et de les gérer.
      Amitiés.

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  2. Kba

    Merci d’avoir élucider cette belle thématique…pour les dentiste novices ça les arrivent souvent mais avec la lecture d’une telle revue aidera beaucoup de nos confrères.
    Il est à souligner de considérer et reconsidérer tout ca s clinique comme étant un danger permanent pour notre carrière professionnelle.

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    • thedentalist

      Bonjour Kba,
      Merci d’avoir laissé un commentaire.
      Oui, tous les praticiens (jeunes et moins jeunes) doivent prendre un minimum de recul pour pouvoir exercer leur métier plus sereinement. Mais c’est loin d’être facile tant les pressions sont nombreuses sur nos épaules. Le risque de conditionnement psychologique est très important : il commence dès les études (pression des profs et de l’enseignement), se poursuit dans les premières années (manque de confiance en soi) et se prolonge par la suite (nombreuses invectives – parfois contradictoires – de la part des autorités professionnelles)…

      Votre dernière remarque m’a interpellé quand vous dites que « tout cas clinique comme étant un danger permanent pour notre carrière professionnelle ». On peut le voir comme ça, mais il faudra créer les conditions pour que ce ne soit pas le cas! Par exemple, prendre sa voiture constitue une menace pour sa vie et mieux vaut rester prudent et vigilant. Au début, cela demande beaucoup d’effort et de concentration mais avec l’expérience, on y pense même plus et on profite même du paysage!
      Portez-vous bien.

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