Quels Moyens pour la Prophylaxie?

Nous avons vu, dans la première partie de cet article quelle place pouvait prendre la dentisterie prophylactique dans le cabinet dentaire moderne. Car oui, la dentisterie du 21ème siècle devra être préventive.

Malheureusement, les moyens prophylactiques à disposition sont mal connus des praticiens, habitués par la Sécu à des traitements réparateurs ou prétendument préventifs mais mal adaptés aux besoins individuels du patient.

Voici quelques pistes prophylactiques à explorer :

FAVORISER  L’EQUILIBRE BIOLOGIQUE

Les maladies parodontales et carieuse font intervenir de multiples facteurs innés et acquis mais qui se traduisent in fine des déséquilibres biologiques :
déséquilibre immuno-inflammatoire pour les maladies parodontales
– déséquilibre du pH intra-buccal pour la maladie carieuse

L’action de l’odontologiste va se concentrer sur les biofilms bactériens en sachant que :

  • Plus le biofilm est ancien, plus il est nuisible. Il donc important de le désorganiser le plus régulièrement possible. Le patient doit donc maitriser les techniques d’hygiène quotidienne et le praticien doit plus se concentrer sur le « dé-plaquage » des surfaces dentaires que sur le détartrage à proprement parler.
  • les structures biologiques (attache parodontale, émail dentaire…) peuvent se réparer si les conditions biologiques le permettent. Il vaut toujours mieux favoriser, quand c’est possible, les processus de réparation naturelle du corps humain que les méthodes de réparation artificielles.

FAVORISER L’EQUILIBRE ALIMENTAIRE

Les conseils alimentaires que l’équipe dentaire va délivrer au patient sont d’une importance capitale, surtout dans la gestion du risque carieux. En effet, un régime trop sucré et/ou trop acide doit être systématiquement recherché en cas de syndromes carieux ou érosif.

L’alimentation industrielle moderne est devenue un cauchemar non seulement diététique mais également odontologique. La concentration en sucres raffinés, utilisés comme réhausseur de gout, a explosé à tel point qu’on en retrouve jusque dans les haricots verts en boîte.
Les boissons gazeuses et/ou sucrées couvrent des kilomètres-linéaires dans les rayons des supermarchés et malheureusement, les patients, dans leur grande majorité, n’ont pas conscience des risques encourus par la consommation régulière de ces produits.

FAVORISER LES SOINS D’HYGIÈNE QUOTIDIENNE

Puisque l’essentiel des soins dentaires d’un individu doivent se faire à la maison, au quotidien, l’équipe dentaire, pour obtenir de bons résultats à long terme, doit sans cesse veiller à ce qu’ils soient correctement réalisés. Cela passe par :

  • Des explications car un traitement n’a de sens que si le patient en comprend le « pourquoi »,
  • Des démonstrations car les techniques d’hygiène efficaces demandent de la dextérité et une prise de conscience,
  • Des prescriptions individualisées et ciblées car certains produits d’hygiène (dentifrices, bains de bouche…) sont plus adaptés à certains profils de patients,
  • Du matériel efficace car les patients sont souvent désemparés face à l’offre pléthorique en la matière,
  • Un changement des comportements du patient qui passe par l’utilisation à bon escient de techniques de communication de manière à comprendre et à agir sur ses émotions.

Le King’s College de Londres, en association avec la société Colgate est à l’origine d’une collaboration internationale d’envergure pour un futur sans caries. Cliquez ici pour avoir accès aux ressources en ligne : www.allianceforacavityfreefuture.org

EXEMPLE CLINIQUE

Voici la situation d’une patiente de 23 ans, sans problème de santé, et qui se présente au cabinet dentaire pour une première consultation. Elle n’a pas consulté depuis 2 ans et souhaite un contrôle et (bien sûr) un « p’tit détartrage ».

Pour la majorité des cabinets dentaires, spécialisés en dentisterie réparatrice, ce type de cas est volontiers qualifié d’inintéressant et aura de grandes chances soit d’être bâclé en 10 minutes chrono par un praticien débordé, soit expédié à un de ses plus jeunes collaborateurs.
Pourtant, il constitue une parfaite occasion de changer de paradigme et de proposer à la patiente un traitement inédit et efficace…

Car à y regarder d’un peu plus près, on constate que malgré une hygiène correcte (mais perfectible), des caries débutantes semblent s’être installées dans les sillons des molaires mandibulaires.

Après quelques minutes d’explications diagnostiques et pronostic, nous proposons à la patiente un plan de traitement légèrement différent de ce à quoi elle a été habituée:

  1. Amélioration de la technique d’élimination de la plaque dentaire car il n’est jamais trop tard pour apprendre à bien brosser,
  2. Conseils alimentaires car à 23 ans, la patiente est particulièrement exposé, sans le savoir, à la malbouffe,
  3. Détartrage, dé-plaquage, polissage soigneux de TOUTES les surfaces dentaires,
  4. Scellement des sillons par une approche minimalement invasive,
  5. Contrôle et maintenance bi-annuels.

CONCLUSION

Pour ce cas clinique, ce n’est pas tellement la technicité et la sophistication du traitement qui ont fait la différence. Tout s’est joué au niveau de la communication, de la sensibilisation, de l’éducation et de l’engagement thérapeutique. Pour cette patiente, désormais acquise à la prévention bucco-dentaire, le pronostic à long-terme de ses dents vient d’être amélioré, nous l’espérons, pour le restant de ses jours.

La prophylaxie, c’est simple, logique et terriblement efficace. Il suffit simplement de s’en donner les moyens.


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6 commentaires sur “Quels Moyens pour la Prophylaxie?”

  1. Ordo1138

    Bonjour et merci pour cet article.

    Quelle approche exacte constitue le traitement minimalement invasif de ces sillons ?

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    • thedentalist

      Bonjour et merci pour votre question.
      Le scellement prophylactique des sillons fait partie de « l’arsenal » thérapeutique en dentisterie minimallement invasive au même titre que l’application de vernis fluoré, des prescriptions individualisées etc.
      En effet, le protocole est le suivant : sablage – acide poly-acrylique – mise en place d’un CVI à libération de fluor
      … tout cela sans un seul coup de fraise!

      Répondre
    • thedentalist

      Bonjour Mist et merci pour votre commentaire et votre sens de l’observation.
      J’ai rajouté à l’article les deux clichés rétro-coronaires pour cette jeune patiente. On distingue effectivement une zone de déminéralisation dentinaire sur la 46. Mais cela n’a pas changé notre stratégie, celle d’une préservation maximale des tissus dentaires. Le scellement des sillons devraient permettre, nous l’espérons, de priver les bactéries de leur apport nutritif et les supprimer in situ. Une reminéralisation dentaire est, dans ces conditions, possible. Les modifications comportementales (hygiène, nutrition…) devraient parfaire cette approche. Et enfin, une surveillance clinique et radiologique périodique a été préconisée à la patiente.
      Merci encore de votre intervention.

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  2. kay

    Bonjour,

    Où peut on subir ce genre d intervention?
    Effectivement ,les dentistes que je consulte ne sont jamais intéressés par ce type d acte ..

    Répondre
    • thedentalist

      Bonjour,
      Bien que ce blog ne s’adresse pas directement aux patients, votre commentaire illustre bien (malheureusement) nos propos puisque ces méthodes ne font pas partie intégrante de l’arsenal thérapeutique de l’immense majorité des cabinets dentaires. Nous le regrettons comme vous…
      Nous ne disposons pas, en France, d’annuaire des praticiens pratiquant ce type de soins prophylactiques du fait de l’absence d’une société scientifique qui rassemblerait les coordonnées de ces membres.

      Répondre

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