Cancer et Soins Bucco-Dentaires

Les patients malades du cancer, si la maladie n’a pas atteint un stade trop avancé, peuvent être traités par chimiothérapie et/ou radiothérapie. Ces traitements peuvent être très efficaces contre la maladie mais ils peuvent occasionner de nombreux effets secondaires, et particulièrement au niveau de la cavité buccale où les dents, le parodonte, les muqueuses buccales et les glandes salivaires peuvent tous être affectés.

Ces effets secondaires sont parfois tellement invalidants qu’ils amènent parfois le patient à stopper ou retarder le traitement anti-cancéreux. Le chirurgien-dentiste a donc un rôle important à jouer pour les comprendre, les gérer, les réduire voire les prévenir.
Dans la première partie de l’article nous avons vu les effets de la chimiothérapie. Dans la deuxième partie, les effets de la radiothérapie. Dans cette troisième partie nous allons préciser les moyens dont dispose le chirurgien-dentiste pour mieux prendre en charge les complications spécifiques aux traitements anti-cancéreux.


PRISE EN CHARGE DU PATIENT SOUS CHIMIOTHÉRAPIE

La première partie de cet article a détaillé les caractéristiques des traitements de chimiothérapie.

  • La neutropénie impose une élimination des foyers infectieux bucco-dentaires par le chirurgien-dentiste et le maintien, par le patient, d’une hygiène bucco-dentaire rigoureuse et efficace.
  • La thrombopénie augmente le risque hémorragique et impose d’éviter les actes sanglants pendant la durée de la chimiothérapie. Le patient doit par ailleurs utiliser des moyens d’hygiène souple et non traumatisants pour les muqueuses.
  • Les nausées et les vomissements font baisser le pH intra-buccal et peuvent initier, favoriser, ou aggraver les processus de destruction des tissus dentaires (caries, érosion, abrasion…). Les prescriptions permettant de rehausser le pH intra-buccal sont de la plus haute importance.

PRISE EN CHARGE DES LÉSIONS MUQUEUSES

Les patients subissant des traitements anti-cancéreux se plaignent très souvent d’aphtes. Le chirurgien-dentiste peut leur conseiller :

  • de bien sélectionner leurs aliments : en évitant ceux qui sont connus pour provoquer des aphtes ainsi que les aliments acides,
  • de maintenir une très bonne hygiène bucco-dentaire,
  • de proscrire le tabac et l’alcool,
  • de faire des bains de bouche bicarbonatés
  • des applications topiques de collutoires, d’anesthésiques locaux ou de glace.

Mais chez la moitié des patients traités, des altérations plus graves de la muqueuse buccale se manifestent : les mucites. Elles évoluent en différents stades vers des ulcérations muqueuses qui ouvrent des portes d’entrée systémiques aux bactéries de la cavité buccale. Si une xérostomie est associée au tableau clinique, ces mucites seront plus intenses, plus longues à cicatriser et pourront même se surinfecter (candidoses).

En fonction de leur sévérité et de leur étendues, les mucites imposent une prise en charge par le chirurgien-dentiste :

  • La prévention du problème passe par une hygiène bucco-dentaire stricte et une élimination des biofilms au moyen d’une brosse à dents extra-souple, des brossettes inter-dentaires et une bonne hygiène des prothèses.
  • L’alimentation doit être souple pour éviter les blessures.
  • Prescription de bains de bouche bicarbonatés à 1,4% pendant 1 minutes, 8 à 10 fois par jour. La chlorexhidine est contre-indiquée.
  • Traitement des lésions par laser-thérapie.
  • Prise en charge topique de la douleur : xylocaïne gel,  bain de bouche à l’aspirine.
Téléchargez une synthèse sur la prise en charge des mucites radio/chimio-induites.

L’OSTÉORADIONÉCROSE

Sous l’effet des radiations ionisantes, les vaisseaux sanguins des maxillaires peuvent être endommagés et provoquer une destruction osseuse. La mandibule est plus souvent touchée que le maxillaire en raison de sa plus forte densité osseuse et de sa plus faible vascularisation. L’ostéoradionécrose est une complication tardive du traitement anti-cancéreux pouvant survenir plusieurs années après le traitement.

Le risque d’ostéoradionécrose est lié à :

  • L’intensité de la radiothérapie (>60 Gy)
  • Une mauvaise hygiène bucco-dentaire avant ou après radiothérapie
  • L’absence d’assainissement bucco-dentaire avant radiothérapie
  • Des traumatismes dans l’année qui suit la radiothérapie (extraction dentaire, irritation prothétique, choc…)

Le traitement de l’ostéoradionécrose, en fonction de la gravité du problème, consiste en :

  • Antibiothérapie,
  • Chirurgie : débridement / reconstruction micro-vasculaire / greffes osseuses,
  • Oxygénothérapie hyperbare avant et après chirurgie pour permettre un meilleur apport d’oxygène dans le sang et favoriser la cicatrisation osseuse.

CONCLUSION

Le chirurgien-dentiste a toute sa place dans l’équipe multi-disciplinaire. La communication des information médicales et thérapeutiques entre les acteurs doit être facilitée par des échanges réguliers et une bonne connaissance des modalités de traitements oncologiques.

A la lecture de cette série d’article consacrée à l’onco-stomatologie, on comprend facilement l’importance préventive et curative d’un bonne bonne prise en charge bucco-dentaire du patient cancéreux qui, sensibilisé à l’importance d’une bonne hygiène bucco-dentaire et d’un suivi régulier après son traitement, saura apprécier l’amélioration de sa qualité de vie.

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2 commentaires sur “Cancer et Soins Bucco-Dentaires”

  1. olivier

    Bonjour,
    Le chirurgien dentiste ou le chirurgien orale peut t’il avoir un rôle dans le traitement des cancers de la cavité bucale ou alors le traitement est t’il spécifiquement réservé au chirurgien maxillo-facial ? Et si oui, dans quelle mode d’exercice et dans quelles mesures ?
    Merci d’avance ;)

    Répondre
    • thedentalist

      Bonjour Olivier,
      La réponse à votre question dépend de la manière dont on entend « traitement des cancers de la cavité buccale ». Dans la mesure où ces traitement sont multi-factoriels et multi-disciplinaires, chaque professionnel de santé peut y jouer un rôle.
      Les cancers de la cavité buccale sont multi-formes et ne connaissent pas les frontières des disciplines universitaires.
      La prothèse maxillo-faciale est un exemple typique de collaboration entre les chirurgiens maxillo-faciaux et les chirurgien-dentistes.
      La traitements chirurgicaux spécifiques nécessitent d’y avoir été longuement formé…mais n’exclut pas – a priori – les chirurgiens-dentistes.

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