Savez-vous Distraire vos Patients?

Peut être avons nous parfois tendance à l’oublier mais, malgré tout nos efforts, l’expérience des patients au cabinet dentaire est rarement vécue comme des plus agréables. L’anxiété liée aux soins dentaires est une réalité qu’il ne faut jamais négliger et qu’il faudra même anticiper. Une manière astucieuse et élégante pour réduire à la fois l’anxiété et la douleur (qui sont d’ailleurs directement liées) consiste à faire diversion.

Voici quelques éléments de réflexions et quelques astuces pour distraire vos patients et peut être faire de leur visite dans votre cabinet une expérience un peu moins désagréable…

LE BAVARDAGE

« J’adore parler de rien.
C’est le seul domaine où j’ai de vagues connaissances. »

Oscar Wilde.

Un confrère médecin généraliste nous faisait un jour remarquer, évoquant sa difficulté, après plusieurs décennies d’exercice, à toujours ressasser les mêmes sujets de bavardages (la météo, la circulation, les vacances…), qu’il enviait notre position de stomatologue qui veut qu’une fois à l’ouvrage, le patient se retrouve, de fait, contraint au silence.

Cela ne veut certainement pas dire que le cabinet dentaire soit un lieu de silence monacal où le patient subirait en silence. Un grand nombre de nos patients sont âgés, isolés, esseulés ou s’ennuient fermement et un rendez-vous dans un cabinet médical est une occasion, d’animer le quotidien. Ces patients apprécient énormément de pouvoir bavarder avec les membres de l’équipe soignante, et encore mieux avec le docteur lui-même. Et c’est là que l’art de la conversation informelle sur des sujets sans importance, se révèle être un atout.

Si vous n’appréciez pas particulièrement parler pour ne rien dire, il n’y a que deux solutions (mais qui peuvent se combiner) :

  1. Soit vous faites un minimum d’effort pour ne pas paraitre taciturne, froid, voire antipathique. Pas besoin d’en faire des tonnes mais un brin de causette est toujours un bon moyen de créer du liant social et par là même de ne pas oublier cette règle fondamentale : nous ne soignons pas des dents mais des gens.
  2. Soit vous déléguez cette mission à un ou plusieurs membre(s) de votre équipe pour qui l’art de la conversation est une seconde nature et vous veillez ainsi à ce que chaque patient qui le souhaite puisse bénéficier de la dose de babillage nécessaire à ce qu’il se sente bien. Evidemment, en présence d’un patient logorrhéique, ce temps de bavardage doit être relativement maitrisé pour ne pas pénaliser le reste du fonctionnement du cabinet dentaire.

L’HYPNOSE

« La vie apporte son lot de douleurs.
Votre responsabilité est de créer de la joie. »
– Milton Erickson

De la conversation à l’hypnose conversationnelle il n’y a qu’un pas. Et ce petit pas pour le praticien peut constituer un grand bon dans la relation thérapeutique. Basée sur les travaux d’Erickson et Thompson, cette technique consiste, sous l’aspect d’une conversation somme toute anodine, à placer le patient dans un état psychique contextualisé et dans lequel il pourra demeurer pendant le déroulement des soins. Particulièrement utile pour les patients anxieux, voire phobiques, vis à vis des soins, elle peut s’appliquer à tous. De nombreuses études ont mis en évidence que l’utilisation de l’hypnose éricksonienne permet de significativement réduire le niveau de stress du patient, le ressenti douloureux et les doses d’anesthésiques qu’il est nécessaire d’administrer. Utilisation concrète des voies et des mécanismes mis en évidence par les neurosciences.

LE THÉÂTRE ANIMÉ

Nous en avons déjà parlé dans un article consacré aux dentistes plus ou moins célèbres, mais le premier praticien à avoir utilisé la technique de la distraction fût un certain Laurent Mourguet, chirurgien-barbier lyonnais à la fin 18ème – début 19ème. Passé à la postérité pour avoir été le créateur du théâtre de Guignol dont la fonction première était de distraire les patients lorsqu’il devait réaliser ses interventions, que l’on imagine assez douloureuses à l’époque. Le succès de Guignol fût tel que Mourguet abandonnera l’art dentaire pour se consacrer à son spectacle.

Un théâtre de marionnette n’a évidemment plus sa place dans un cabinet moderne, mais le principe de la distraction reste valable, particulièrement dans le cadre des soins pédiatriques. Utiliser des accessoires ou des déguisements, imaginer un jeu ou une histoire de super-héros ou de princesse sont autant de stratégies utiles pour faire diversion.

L’installation d’un écran de télévision ou d’un casque de réalité virtuelle est une solution très intéressante. La société Zenium fabrique et distribue des éclairages de plafonnier équipé d’un écran-plat, qui relié à un lecteur de DVD ou autre, permet de diffuser des images qui capteront l’attention du patient pendant ses soins. Les longues séances de soins paraissent ainsi plus courtes et il est enfin révolu le temps où compter les toiles d’araignées au plafond était la seule occupation que l’on pouvait avoir sur le fauteuil du dentiste.

CONCLUSION

La distraction est une excellente stratégie dont dispose l’esprit pour mieux supporter l’adversité. L’expérience qu’aura le patient du soin n’en sera qu’améliorée. Mais c’est également une excellente stratégie pour le praticien et son équipe pour entretenir des relations qualitatives avec leurs patients. Car n’oublions jamais qu’ils y sont, quasiment tous, et dans une large mesure, bien plus sensibles qu’à la qualité technique des soins.


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2 commentaires sur “Savez-vous Distraire vos Patients?”

  1. Agnes Sadoux

    En effet, l’utilisation du super-hero ou de la princesse est aussi une technique d’hypnose.
    Quel plaisir que l’hypnose, car tous les inconscients en profitent : j’adore, je me sens reposée, alors que c’est moi qui ai travaillé !
    La diversion hypnotique est très facile à enseigner au patient, et permet , en cas d’urgence, de le faire patienter jusqu’à l’efficacité optimale de nos traitements. Cela demande environs 10 à 15 minutes et fonctionne aussi par téléphone (cf regulation lors du 1 er confinement)
    Merci pour ce sujet.
    A bientot

    Répondre
    • thedentalist

      Merci Agnès de nous faire part de votre expérience. L’hypnose semble ne présenter que des avantages et -précision importante- ces effets sont scientifiquement prouvés. A quand son enseignement dans la formation initiale des chirurgiens-dentistes (voire de tous les soignants)?

      Répondre

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