Plan de Traitement #1

Il arrive qu’un plan de traitement fasse intervenir différents types de prothèses nécessitant des étapes de réalisation spécifiques. Comment les organiser pour obtenir un résultat cohérent?

Une patiente de 40 ans, sans aucun problème de santé, mais fumeuse (5 cigarettes/jour) consulte pour une réhabilitation orale. Les symptômes tels qu’ils sont exprimés par la patiente sont des mobilités dentaires et un aspect inesthétique de son sourire en raison de la vestibulo-version des incisives maxillaires restantes. La patiente est anxieuse vis à vis des soins dentaires.

DIAGNOSTIC

Cette patiente souffre d’une parodontite agressive, aggravée par le tabac. Les édentements ont entrainé des migrations dentaires secondaires sous l’effet de l’adaptation fonctionnelle.

PRONOSTIC ET PLAN DE TRAITEMENT

L’analyse de facteurs de risque est la suivante :

  • Au niveau parodontal : le risque est très élevé du fait de l’avancement de la parodontite agressive. Le pronostic est sans espoir pour les dents 14, 24, 27, 37. Il est réservé pour les autres dents maxillaires : 18, 17, 16, 13, 11, 21, 22, 23. Il est correct pour les dents mandibulaires de 35 à 45.
  • Au niveau dentaire : aucune lésion carieuse ou érosive n’est à déplorer. Seule la dent 18 porte un amalgame occluso-mésial. Le pronostic au niveau des tissus dentaires restants est bon.
  • Au niveau fonctionnel : l’examen clinique n’a révélé aucune anomalie de fonctionnement des structures musculo-articulaires. Le pronostic du fonctionnement de l’appareil manducateur après réhabilitation prothétique est bon.
  • Au niveau esthétique : La patiente est relativement jeune et sa préoccupation esthétique s’inscrit dans sa démarche de recherche de traitement. Sa ligne du sourire est moyennement haute. Le pronostic est réservé.

Le plan de traitement qui a été retenu en accord avec la patiente est le suivant :

  1. Traitement parodontal initial : enseignement des techniques d’élimination de la plaque dentaire, surfaçages-curetages
  2. Extraction des dent 37 et 27 et mise en place de 4 implants dans les secteurs mandibulaires postérieurs
  3. Extraction des dents 18, 14, 11, 21, 22, 24 et mise en place d’une prothèse amovible partielle provisoire maxillaire
  4. Réalisation de couronnes jumelées fraisées sur les dents 17 et 16 (dents conservées vivantes)
  5. Réalisation au maxillaire d’une prothèse amovible partielle à châssis métallique de 10 dents
  6. Réalisation de 4 CCM implanto-portées sur les implants mandibulaires postérieurs.

A l’aide de nos explications et de nos conseils, la patiente a choisi d’orienter sa stratégie de traitement de sorte que l’arcade mandibulaire, dont les dents ont un meilleur pronostic qu’au maxillaire, puisse être réhabilitée de manière stable grâce à 4 implants ostéo-intégrés. La patiente a très bien compris l’incertitude qui plane sur les dents maxillaires résiduelles et n’a pas vu d’inconvénients à une conception combinée amovible / fixée. Le délai offert par cette solution lui permet ainsi de prévoir un budget pour une réhabilitation implantaire maxillaire dans un futur à moyen ou long terme.

REALISATION PROTHETIQUE

  • Mise en place des prothèses provisoires fixes (17-16) et amovibles suite aux extractions des dents maxillaires.

A ce stade, ces prothèses provisoires servent de test esthétiques, fonctionnels et phonétiques pour les restaurations d’usage.

  • Réalisation des armatures des prothèses fixes dento-portées
Les wax-up permettent de matérialiser le projet prothétique.
  • Réalisation du châssis métallique, des piliers et des armatures de prothèses implantaires
  • Essayage et ultime enregistrement du RIM
  • Montage des dents prothétiques et de la céramique
  • Résultat à 2 ans

CONCLUSION

Entre ces différentes prothèses, seules les techniques d’empreintes ont différé pour enregistrer les différents types de support. Quatre types d’empreintes globales ont été nécessaires  selon l’objectif :

  1. Alginate et porte-empreinte du commerce pour les prothèses transitoires fixes et amovible
  2. Silicones et porte-empreinte individuel en double mélange pour les prothèses fixes dento-portées
  3. Polyethers et porte-empreinte individuel pour le châssis métallique de la PAP
  4. Polyethers et porte-empreinte individuel pour les prothèses implantaires

Mais pour que ces empreintes soient exploitées de manière cohérente, certains paramètres sont immuables :

  • Des tissus biologiques sains ou assainis
  • Un rapport inter-maxillaire (RIM) stable et reproductible
  • Une dimension verticale stable (DV)
  • Des contacts occlusaux postérieurs bilatéraux et simultanés (OIM)
  • Un positionnement des dents antérieures à la fois fonctionnel, phonétique et esthétique (Surplomb et Recouvrement)
  • Une communication précise et fiable avec le laboratoire de prothèse : maquettes d’occlusion, montage en articulateur, wax-up/montage directeur, photographies

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7 commentaires sur “Plan de Traitement #1”

  1. isidore

    magnifique!
    vraiment …. du bon boulot, qui regroupe toute l’omnipratique en plus.
    chapeau et encore bravo!

    Répondre
    • thedentalist

      Salut Isidore et merci pour ce commentaire enthousiasmant!
      J’ai eu plaisir à réaliser ce cas pour plusieurs raisons : la motivation de la patiente et la difficulté de la situation (relativement jeune âge, situation parodontale compromise…). Effectivement, la multi-disciplinarité du traitement ne l’a rendu que plus intéressant. Au niveau purement prothétique, la « cohabitation » des trois grands types de prothèses m’ont poussé à réfléchir à leurs dénominateurs communs pour les faire fonctionner ensemble.
      J’espère vraiment que vous pourrez en retirer quelque enseignement pour votre pratique quotidienne.
      A très bientôt.

      Répondre
  2. PROTO

    bon document mais incomplet
    on ne parle pas du tracé qui guide la préparation de la bouche
    cette omission est très regrettable car le tracé fait partie des responsabilités légales du praticien.

    Répondre
    • thedentalist

      Bonjour Proto,
      Vous avez entièrement raison. Mais le fait que l’iconographie du tracé soit manquante ne signifie pas que cette étape ait été négligée. Nous réalisons systématiquement le tracé prospectif du châssis sur les modèles issus des empreintes primaires. Des améloplasties et des surfaces de guidages sont également réalisés dans tous les cas.
      Merci de votre visite et de votre commentaire.

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  3. Hana Amouri

    Un très beau travail, bien clair, bien détaillé ! merci beaucoup pour votre générosité. Mais en tant que parodontiste je voulais juste voir plus de détails concernant le traitement de la parodontite agressive ( vu que c’est la parodontopathie la plus difficile à traiter et à stabiliser): est-ce que vous avez opté pour un traitement chirurgical ou non chirurgical ? Quelles sont les valeurs de sondage initiales ? Comment ces valeus ont-elles évolué après traitement ? Pourquoi vous avez opté pour l’extraction des dents antérieures au lieu de la régénération osseuse guidée par exemple…
    Sinon c’était vraiment instructif de lire cet article et je vous félécite pour la qualité du travail.

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    • thedentalist

      Chère consoeur,
      merci pour cette question pertinente.
      Nous avons opté pour un traitement non chirurgical d’assainissement par surfaçages-curetages.
      Je ne suis pas en mesure de vous donner les valeurs de sondage précises car nous ne réalisons pas de charting complet systématique. Nous préférons combiner les données issues de l’état de santé général, du niveau d’hygiène, l’inflammation, les mobilités etc.
      Mais après ré-évaluation à 3 mois, il faut que l’inflammation ait disparu, que les mobilités soient réduites, que l’attache conjonctive se soit reconstitué.
      Concernant les dents antérieures : plusieurs considérations justifient le choix que nous avons fait :
      – la parodontite est – comme vous le soulignez – agressive. Le pronostic de ces dents nous a donc semblé sans espoir au vu de la mobilité initiale des dents et de l’importance de l’atteinte osseuse sur des dents monoradiculées, coniques et relativement courtes
      – la composante esthétique était impliquée. Le motif de la consultation était d’ailleurs la vestibulo-version de ces dents.
      – à l’époque, les techniques de régénération osseuse n’étaient pas aussi performantes qu’aujourd’hui

      Merci pour votre commentaire et l’intérêt que vous portez à ce travail.
      Bien à vous.

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  4. Hugo

    Bonjour docteur,
    Merci pour le partage de cet article qui remonte à quelques années et que j’ai le plaisir de découvrir aujourd’hui.
    J’aurais une question: vous écrivez à la fin de l’article « Alginate et porte-empreinte du commerce pour les prothèses transitoires fixes et amovible ». Cela signifie que les prothese fixes transitoires ont été réalisées au laboratoire et ensuite rebasées en bouche ? Et donc pas par automoulage ?

    Ensuite, pouvez-vous me confirmer que le montage directeur a été réalisé sur le moulage issu de l’empreinte en silicone et non de l’empreinte primaire ?

    Merci beaucoup !

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