La Compliance et l’Influence

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Parmi tous les patients que reçoit un chirurgien-dentiste tout au long de sa carrière, certains suivent scrupuleusement ses recommandations : ils sont réguliers dans leurs visites de contrôle, ils suivent les prescriptions à la lettre et maintiennent un très bon niveau d’hygiène. Leur santé bucco-dentaire est stable à long-terme.
Pour d’autres, c’est plus compliqué et le praticien se demande souvent pourquoi ces patients sont si peu compliants.

QU’EST CE QUE LA COMPLIANCE?

La compliance désigne le bon suivi, par le patient, d’un traitement médicamenteux. Sa mesure est importante pour quantifier l’efficacité du traitement.

Hippocrate (460 av. JC – 370 av. JC) faisait déjà remarquer que pour soigner correctement : « …il convient non seulement faire soi-même ce qui convient mais encore être secondé par le malade, par ceux qui l’entourent et par les choses extérieures. »

En d’autres termes, l’efficacité du traitement ne réside pas uniquement dans l’esprit ou dans les mains du thérapeute mais, pour une large mesure, dans la dynamique qu’il réussit à induire chez le patient et son entourage. Nous l’avons déjà dit et nous le répétons, l’amélioration de l’efficacité thérapeutique ne passe pas uniquement par la sophistication des moyens techniques.

LA COMPLIANCE DU PATIENT

Les traitements dentaires intègrent, parfois de manière complexe, des traitements orthodontiques, parodontaux, prothétiques et cela sur des patients plus ou moins jeunes. La compliance des patients est d’autant plus essentielle pour la réussite du traitement.

Les chances de succès d’un traitement sont plus importantes si le patient est motivé, informé et coopératif : le traitement parodontal a plus de chance de réussir si le patient élimine correctement la plaque dentaire; la gouttière occlusale fera effet si le patient la porte comme il le faut; le traitement médicamenteux n’agira que si le patient se rend à la pharmacie pour se le procurer…

A l’inverse, un patient insuffisamment motivé et coopératif peut faire échouer un traitement pourtant conduit selon les règles de l‘art.

La qualité du contact joue souvent un rôle beaucoup plus déterminant que le savoir-faire technique. Les possibilités de traitement ont beau être multiples, le plus beau sourire ne saurait être réalisé sans la coopération du patient.

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L’INFLUENCE DU PRATICIEN

Les termes d’observance, d’adhésion thérapeutique, de compliance, bien que concernant le patient, n’ont pas beaucoup de sens sans la capacité de stimulation du praticien.

Traditionnellement, la collaboration médicale s’entend par la communication et le partenariat entre différents professionnels de santé. L’importance de la collaboration du patient, avant, pendant et après le traitement doit en faire un acteur qu’il ne faut surtout pas mettre « hors circuit » si l’on cherche à intégrer les compétences du patient à celles des équipes soignantes.

La littérature dentaire s’est depuis longtemps penché sur ce concept de compliance mais les études produites ne semblent pas réussir à connecter la compliance des patients dentaires avec l’obtention et le maintien de la santé bucco-dentaire pour chaque patient. Certaines études se sont concentré sur la fréquence et la régularité des visites de contrôles. Mais consulter régulièrement son chirurgien-dentiste, sans hygiène bucco-dentaire quotidienne, suffit-il à s’assurer d’une bonne santé bucco-dentaire?

D’autres études ont étudié les techniques d’hygiène bucco-dentaires quotidiennes et n’ont pas réussi à dégager de consensus clair sur quelles méthodes étaient les plus efficaces pour la santé dentaire et parodontale.

Au cours des dix dernières années, l’étude du développement des biofilms  a profondément changé notre compréhension des maladies carieuses et parodontales. Si ces biofilms se reforment toutes les quatre à six heures, alors, pourquoi ne pas faire du patient lui-même son propre et meilleur thérapeute? Le praticien et son équipe limiteraient ainsi leur action à l’encouragement et à l’accompagnement.

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CONCLUSION

En France, on estime à 2 milliards d’euros le coût de la non-observance des traitements médicaux et l’OMS considère que l’amélioration de l’observance pourrait avoir un impact sanitaire bien plus important que n’importe quelle découverte médicale.

Un chirurgien-dentiste au fait de la motivation de ses patients, jeunes ou adultes, et capable de la stimuler, influencera souvent pour toute la vie l’attitude du patient pour une meilleure santé bucco-dentaire. Lorsque le praticien constate qu’un patient n’est pas ou peu compliant, il est important de le noter dans le dossier médical. Doit s’ensuivre une discussion franche, honnête et respectueuse avec le patient pour lui faire prendre conscience que le non-suivi des recommandations et des ordonnances augmente les risques d’échec du traitement.

Expliquer le traitement au patient est important; lui faire comprendre que sans son aide rien n’est possible l’est tout autant.


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3 commentaires sur “La Compliance et l’Influence”

  1. Nicolas Dritsch

    Bonjour Guillaume,
    Heureux que tu abordes le sujet même si ça reste très normatif ici et que le terme de compliance est peu à peu abandonné en matière d’éducation à la santé et thérapeutique. Concrètement on essaye d’être plus sur la racine Educere qu’Educare
    http://rivaud.phpnet.org/debat/educare.html
    En terme d’alliance thérapeutique nous avons probablement autant à apprendre des recherches issues de l’école de Palo Alto (Cf le Mental Research Institute par exemple pour les publications) ou les approches centrées sur la personne (Cf l’Entretien motivationnel) que des publications dento-dentaires.
    Un jour peut être on pourra en parler de vive voix :)
    Bien à toi,
    Nicolas

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    • thedentalist

      Cher Nicolas,
      Merci une nouvelle fois pour cette contribution de qualité à laquelle je me suis permis de rajouter les liens hypertextes.
      Les sciences cognitives sont évidemment une ressource immense pour le soignant. Malheureusement, le monde dentaire est un peu trop focalisé sur le savoir-faire technique et technologique. C’est dommageable, je pense, pour la qualité et la dynamique de la relation thérapeutique. En revanche, les praticiens qui, comme toi, s’intéressent à ces sujets passionnants, y trouveront à coup sûr des moyens de potentialiser leurs traitements et de consolider les rapports qu’ils entretiennent avec leurs patients, avec leur équipe, avec leurs confrères…et pourquoi pas avec eux-mêmes!
      Je connaissais les travaux de l’école de Palo Alto sur les thérapies familiales mais ces théories, pour espérer sensibiliser la majorité de nos confrères, doivent être adaptées ou transposées à notre exercice.
      Au plaisir d’en discuter avec toi…
      A bientôt.

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      • Nicolas Dritsch

        D’autant plus dommage quand on voit dans l’étude du CNO que la partie relationnelle avec les patients est au même niveau que la difficulté technique dans les causes du burn out de notre métier.
        J’émets l’hypothèse que ça ne peut qu’augmenter avec l’accroissement des grosses structures où l’on doit aussi gérer le relationnel au sein de l’équipe (associés, collaborateurs, assistantes…)
        J’essaye de travailler à l’adaptation à notre spécialité de ce que j’ai appris depuis 8ans en psychologie systémique et intégrative. L’avenir nous dira si ça peut être intéressant.
        amitiés,
        Nicolas

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