Le monde change a une vitesse fulgurante. De nouvelles technologies (Objets connectés, Big data, Intelligence artificielle…) font leur irruption dans tous les domaines de la société. La médecine n’est évidemment pas en reste et bien que nous ne soyons qu’aux balbutiements de cette révolution numérique, des réserves et des inquiétudes se font déjà entendre.
PROPHYLAXIE POUR TOUS
Tout le monde s’accorde sur l’intérêt du diagnostic précoce, tant au niveau individuel qu’au niveau des communautés. La tendance moderne de la médecine est au Multiphasic Health Screening (MHS) : au cours du même examen, de multiples procédures diagnostiques sont réalisées dans le but de repérer, au sein des groupes de population, les individus qui présentent des facteurs de risque et/ou des symptômes annonciateurs.
Le MHS représente donc une des possibilités pour détecter les changements biologiques avant qu’ils ne produisent des symptômes suffisamment remarquables pour alerter le patient et le pousser à consulter. Il s’agit à la fois d’une détection précoce des pathologies et de la prévention de leur progression. L’intérêt prophylactique est donc réel.
Concrètement, il s’agit d’utiliser des tests, des examens et des questionnaires qui, pour être véritablement efficaces, devront être automatisés. L’efficacité des ces outils s’approche des méthodes de production de masse utilisées dans l’industrie. Le but étant de réduire les couts du diagnostic et d’augmenter le nombre de patients traités. Le développement de la technologie et des machines s’oriente très nettement vers des objets connectés à vocation médicale.
PERSPECTIVES ET CRITIQUES
S’opposent déjà les sceptiques qui pensent que cela va encore un peu plus dépersonnaliser la relation patient-praticien et les partisans de l’efficacité, qui espèrent voir diminuer les files d’attente infinies de patients. Mais la vraie question est de savoir comment les nouvelles technologies vont être introduites au sein du – déjà complexe – monde médical avec un triple objectif :
- l’amélioration de la qualité de vie du patient
- l’amélioration de la santé des populations
- l’amélioration des conditions de travail des professionnels de santé
Bien que cette question reste en suspens, on peut déjà observer la mise en place de gigantesques canaux d’acheminements des données numériques de santé. Et outre les problèmes de respect du secret médical, d’autres craintes surgissent :
- On ne sait pas encore si ces méthodes permettront de réduire l’erreur humaine ou si elles n’augmenteront pas le nombre de faux-positifs et les faux-négatifs;
- On ne sait pas encore si les masses de données recueillies ne vont pas perdre les praticiens et ne leur demandent que plus de travail pour établir le bon diagnostic;
- On ne sait pas encore si, à terme, le processus intellectuel de diagnostic ne soit réservé qu’à des intelligences artificielles, seules capables de gérer et d’interpréter ces quantités astronomiques de données.
TANT QU’IL Y AURA DES HOMMES
Il faudra surement quelques décennies aux ingénieurs pour arriver des résultats probants. Pour obtenir de bonnes capacités diagnostiques, il faudra garder à l’esprit :
D’abord, que les erreurs par omission sont plus fréquentes que les erreurs par commission. Par ex : oublier de poser une question ou de réaliser un examen.
Ensuite, qu’il y a deux sources d’erreur en matière de diagnostic médical :
- Prise d’information incomplète en raison d’une anamnèse inadéquate;
- Compréhension incomplète de la signification des symptômes du patient malgré que ce dernier les aient été correctement énoncés.
Ces deux sources produisent à elles seules plus d’erreurs médicales que d’erreurs liées à un mauvais examen clinique. (Source : Encyclopedia Britannica)
La compréhension de l’état du patient, de ses capacités intellectuelles et émotionnelles est donc essentielle et il devient tout aussi nécessaire de calmer l’interminable logorrhée de l’éternel plaignant que de savoir soutirer des informations à la personne plus réservée.
Bonne rentrée à tous.
A lire également :
- Médecine du futur – Le Monde.fr
- Les Nouveaux Tests Diagnostics Salivaires – The Dentalist
- La Compliance et L’influence en Thérapeutique – The Dentalist
Excellent article, je rajoute un lien sur le fameux robot watson d’IBM qui après avoir battu kasparov aux echecs et les stars americaines du Jeopardy debarque aujourd hui dans les hopitaux et decele des pathologies oncologiques qui avaient échapées au medecin. http://www.numerama.com/sciences/188174-une-ia-detecte-sur-une-patiente-une-leucemie-rare-ratee-par-les-medecins.html.
Un formidable outil de diagnostic qui sera peut être disponible en application sur nos smartphones dans quelques années, qui sait?
Cher Ami,
Merci pour ce lien très intéressant et parfaitement en rapport avec le sujet.
Les progrès technologiques qui s’annoncent dans un futur proche donnent le tournis tant sur le plan des possibilités et des espoirs que sur le plan des écueils et des dérives qui ne manqueront pas de survenir.
La pratique médicale telle que nous la connaitrons à la fin de carrière sera probablement très éloignée de ce que nous avons connu à la sortie de la fac!
Toi qui es un féru de technologie, qu’en penses-tu?
Notre soucis en odontologie est que le diagnostic n est pas toujours corrélé avec le pronostic et encore moins avec le sémiologie.
C’est toute la difficulté en effet. La sémiologie doit étudier les signes et les symptômes. Le diagnostic doit rechercher la cause des signes et des symptômes. Le pronostic quant à lui doit repérer les facteurs de risque en présence. Ces 3 éléments sont intiment liés mais peuvent parfois sembler être déconnectés. Ex : des signes/symptômes similaires peuvent avoir des causes différentes. Le diagnostic différentiel demande donc des examens complémentaires. Les machines et l’I.A pourront peut être nous aider en étant plus rapides et plus performantes.
Mais un autre soucis émerge selon moi : ne risque-t-on pas de créer des maladies là où il n’y en a pas (ou pas encore) en générant de l’anxiété chez le patient. D’ailleurs, d’après l’OMS, la santé se définit comme un bien être physique et sociale qui ne signifie pas nécessairement l’absence de pathologie.
Autre question : si les machines sont un jour en charge du diagnostic des patients, où se situera la responsabilité des praticiens?
Qu’en penses-tu?