L’indication et la conception prothétiques ne doivent en aucun cas être des choix stéréotypés. Les différents types de prothèses présentent toutes des avantages et des inconvénients qui leur sont propres. Différents matériaux, différents design, différents modes d’assemblage sont aujourd’hui à notre disposition et il convient de tous les connaitre.
Il est même d’une importance primordiale de définir le cahier des charges de la prothèse lors de sa conception. La prothèse devra répondre aux impératifs biologiques, fonctionnels, esthétiques tels qu’ils sont dictés par l’analyse du cas clinique, les préférences du patient et de les règles de la planification thérapeutique.
Pour illustrer ce propos, voyons le cas d’un patient qui consulte pour deux raisons principales :
1- une douleur et un gonflement de la gencive dans le secteur maxillaire gauche
2- une dent absente dans le secteur maxillaire droit et pour laquelle il aimerait connaitre les options de remplacement.
LES MOTIFS DE CONSULTATION
Le patient est âgé de 68. Son état de santé général est bon : il ne prend aucun médicament. Il est non fumeur.
Dans le secteur maxillaire gauche, on observe la présence d’un bridge céramo-métallique, dento-porté, de 3 éléments remplaçant la dent 24 et d’une couronne métallique sur la dent 27.
On observe une tuméfaction gingivale vestibulaire en regard de la 25. Le sondage montre une poche, très localisée de plus de 12mm, sur cette dent.
Dans le secteur maxillaire droit, la dent 15 est absente depuis plusieurs années. La dent 14 est intègre (hormis une zone d’érosion cervicale vestibulaire) et la dent 16 est porteuse d’une restauration en composite dont l’étanchéité marginale et la morphologie laissent à désirer.
PROPOSITIONS DE TRAITEMENT
L’indication d’extraction de la 25 est posée en raison de la présence d’une fêlure radiculaire. Le remplacement de la 25 mais aussi de la 24 et de la 14 sont alors à considérer.
Différentes options sont présentées et expliquées au patient en termes d’avantages, d’inconvénients, de protocoles, de risques potentiels et de coût :
- Prothèses implanto-portées
- Prothèses conjointes dento-portées
- Prothèse amovible partielle à châssis métallique
RÉALISATION PROTHÉTIQUE DU SECTEUR 2.0
Pour le secteur maxillaire gauche, l’option du bridge permettrait, en plus de remplacer les dents absentes, de renouveler les coiffes des dents 26 et 27, et d’éviter le recours à l’implantologie. Inconvénient : une préparation périphérique s’impose sur la 23. La dent est vivante et saine mais le risque de complication pulpaire est faible.
RÉALISATION PROTHÉTIQUE DU SECTEUR 1.0
Dans le secteur maxillaire droit, l’option implantaire est tout à fait indiquée. Mais là encore, le patient aimerait privilégier une approche non chirurgicale, plus rapide et plus économique.
Nous lui proposons de tenter la réalisation d’un bridge en cantilever prenant appui sur la 16, pour laquelle une restauration s’impose. Cette prothèse en zircone, sera assemblée selon un protocole adhésif. Bien qu’il n’ait pas encore un grand recul clinique, ce concept de bridge collé cantilever postérieur est parfaitement bien indiqué pour ce patient car la dent 16 est large et haute, présente de grandes plages d’émail et le patient ne présente pas de facteurs de risque fonctionnels (absence de dysfonction ou de parafonctions occlusales). De plus, la cavité occluso-mésiale de l’ancienne obturation permettra de concevoir une connexion avec le cantilever large et solide.
CONCLUSION
» Si le seul outil dont vous disposez est un marteau, tout finira par ressembler à un clou. »
Abraham MASLOW
Malgré les progrès énormes de l’implantologie, les bridges dento-portés sont loins d’avoir dit leur dernier mot. Bien indiqués et correctement réalisés, ils peuvent donner une réponse rapide et satisfaisante au patient tout en évitant l’invasivité et les difficultés de l’acte chirurgical implantaire.
Pour notre patient, 3 séances ont permis de résoudre l’ensemble des problématiques : remplacement des dents absentes, consolidation des dents adjacentes, amélioration esthétique et fonctionnelle.
A l’heure où le gradient thérapeutique et la préservation tissulaire s’impose à tous les chirurgiens-dentistes, faire un bridge, de surcroit bien réalisé, ne constitue pas un crime, surtout s’il peut éviter les risques et les complications inhérentes aux techniques d’implantologie.
A lire également :
- Le Bridge Cantilever
- Le Collage de la Zircone
- Combien de Temps dure un Bridge?
- Travailler les Pontics de Bridge
- Implants ou Pas Implants?
Bonjour et merci pour la publication de cet article 😉
Ma question concernant la réalisation du bridge transitoire secteur 2 .
1. Comment protégez vous l’alvéole de 25 au moment de repositionner la clef afin d’éviter la fusée de résine à l’intérieur ?
2. Le fait de positionner le bridge transitoire au dessus d’une alvéole ouverte n’entraîne t’il pas un problème de bourrage alimentaire générant des douleurs au patient ?
Je me suis posé cette question dans le cas d’un bridge antérieur où 11 et 21 devaient être extraites et un bridge provisoire posé immédiatement sur les alvéoles…
Très bonnes questions Hugo. Merci.
Après extraction et curetage de l’alvéole, nous avons simplement mis en place une éponge hémostatique de collagène dans le fond de l’alvéole. La résine doit pénétrer dans les 3 premiers millimètres de l’alvéole pour sculpter un beau site de pontic lors de la cicatrisation muqueuse. Pas besoin de suturer, c’est ce pontic « pénétrant » qui referme le site chirurgical.
Nous avions fait une série d’articles sur ce thème et qui détaille bien le protocole :
– Travailler les pontics de bridge – partie 1
– Travailler les pontics de bridge – partie 2
– Travailler les pontics de bridge – partie 3
Merci beaucoup !
Je n’avais pas lu ces articles merci pour les liens 😉
Bonjour,
Bravo pour la réalisation de ce plan de traitement parfaitement mené et iconographié.
Merci de montrer que l’implantologie n’est pas l’unique solution de remplacement.
Ma question concerne le secteur 1. Lorsque l’endentement est ancien et qu’il n’y a pas eu d’egression des dents bordants l’edentement, comme ça a l’air d’être le cas ici, conseilles-tu toujours au patient de remplacer la dent absente?
Merci et à bientôt j’espère.
Cher ami,
merci pour ton commentaire.
L’abstention thérapeutique est à considérer dans une situation comme celle-ci, tu as raison de le remarquer. Dans le cas présent, c’est le patient qui en a fait la demande. Le remplacement d’une dent absente n’est pas une nécessité absolue.Des études ont été menées sur ce sujet et montrait qu’une grande majorité des malheurs que les praticiens prévoient à leurs patients abstentionnistes ne se produisaient pas! Voici d’ailleurs le lien vers un article sur le sujet paru dans Réalités Cliniques.
Cela dit, remplacer une dent absente est souvent préférable en termes de stabilité intra- et inter-arcade, en termes fonctionnels, parfois en termes esthétiques. Mais ce sont souvent une multitudes de critères qui sont à prendre en compte (l’ancienneté de l’édentement, les risques d’évolution, la technicité et les coût des options thérapeutiques, les difficultés liées au cas, l’âge du patient, sa motivation …), beaucoup plus que la vision normative du praticien.
J’espère avoir bien répondu.
Merci de ta fidélité au site.
Très amicalement.