Le bon positionnement des bords incisifs des incisives centrales maxillaires est une étape fondamentale du plan de traitement. Il se fait d’abord de manière visuelle en respectant les règles de l’esthétique. Mais il doit également respecter les règles de la phonétique de manière à éviter au patient d’éventuelles difficultés d’élocution.
Face à des difficultés phonétiques, la première chose à faire est de déterminer le/les son(s) qui posent problème au patient. Lors d’une modification des bords libres des incisives, les sons qui peuvent être modifiés sont : les « F ou V » et les « S »
LES « F » OU LES « V »
Ces sons sont les plus simples à comprendre dans la mesure où ils dépendent directement de la position des bords libres des incisives centrales maxillaires par rapport à la lèvre inférieure, sans faire intervenir les incisives mandibulaires.
Lorsque le patient prononce « Philadelphie », les bords libres des incisives centrales maxillaires doivent affleurer le bord vermillon (jonction entre lèvre humide et lèvre sèche) de la lèvre inférieure.
Si les bords incisifs viennent pincer la lèvre inférieure, cela signifie que les incisives centrales sont trop longues.
LES « S »
Ces sons sont plus fréquemment problématiques et plus difficiles à solutionner. En effet, les « S » dépendent des rapports entre les incisives centrales maxillaires, des incisives mandibulaires et de la langue qui s’interpose entre les deux arcades.
Si un patient se plaint d’un « zozotement » après traitement, il faut évaluer le nombre de dents qui ont été altérées afin de déterminer l’origine du problème. Si les dents d’une seule arcade ont été modifiées, le problème est plus simple à gérer que si les dents des deux arcades ont été modifiées.
Très souvent, le « zozotement » est causé par un sur-contact des incisives lors de la prononciation des « S ». Il est sage, en règle générale, de patienter 4 semaines pour voir si le patient s’adapte de lui même avant d’envisager de modifier la position des bords libres incisifs.
Si le problème persiste au delà de 4 semaines, il faut demander au patient de prononcer « 166 » et d’avoir les yeux rivés sur les dents antérieures lors de la prononciation :
- Dans 70% des cas, pour prononcer le « S », le patient place ses incisives en bout à bout
- Dans les 30% restants, le patient place sa mandibule de manière à ce que les les bords incisifs mandibulaires en regard des faces palatines des incisives maxillaires. Pour ces patients, le problème phonétique ne vient pas de la longueur des incisives maxillaires mais plutôt des rapports entre les faces palatines des incisives supérieures et les bords incisifs mandibulaires.
Mais quelque soit la manière qu’a le patient de prononcer les « S », la méthodologie de traitement est pratiquement toujours la même. Il faut d’abord placer une feuille très fine de papier à articuler entre les incisives et demander au patient de prononcer « 166 ». Si des zones de contact sont mises en évidence, cela veut dire que les bords incisifs viennent interférer avec « l’espace phonétique minimal » à leurs niveaux. Il suffit de les éliminer jusqu’à ce qu’il n’y ait plus aucun contact entre les dents lors de la prononciation des « S ». La difficulté est de savoir s’il faut retoucher les dents supérieures ou les dents inférieures.
Si on décide de réduire les bords incisifs des incisives centrales maxillaires, cela peut altérer le résultat esthétique. Si on décide réduire les bords incisifs mandibulaires, cela va effectivement éliminer le « zozotement » mais on risque de perdre les contacts occlusaux antérieurs, qui après égression secondaire, s’établiraient à nouveau et reproduiraient le problème phonétique.
Pour la majorité des patients qui prononcent le « S » en bout à bout, il est préférable de retoucher les bords incisifs mandibulaires pour corriger la phonation sans modifier l’esthétique du sourire. Il faut ensuite s’assurer que les contacts occlusaux en OIM sont toujours corrects. Si les rapports occlusaux antérieurs sont insuffisants, on peut toujours rajouter un peu de composite au niveau des faces palatines des incisives supérieures ce qui n’affectera pas la prononciation du « S » en position de bout à bout et empêchera le « zozotement » de récidiver.
Si le patient prononce le « S » en position retruse, la solution consiste quasiment à chaque fois de modifier la face palatine des incisives maxillaires. Le « zozotement » sera éliminé, et ni les bords incisifs, ni les rapports occlusaux antérieurs ne seront modifiés.
CONCLUSION
La compréhension des concepts phonétiques doit permettre de résoudre les problèmes d’élocution consécutifs aux traitements dento-prothétiques. Il faut toujours laisser un peu de temps au patient pour s’adapter naturellement.
Les enfantes en classe III ont-ils des difficultés à prononcer les sons f et v et produisent-ils ces sons par un contact de l’incisive inférieure avec la lèvre supérieure ou comme les enfants des classe I et II ?
Merci
Bonjour BOE,
Les cas de classe III étant relativement rares et je ne m’étais jamais posé cette question…
Il fort probable que la l’analyse fine de la phonation des sujets en classe III montrent des différences dans le mode d’émission de certaines sons.
Je vous dirais que ces patients doivent probablement utiliser des mécanismes adaptatifs (position mandibulaire, position de la langue, des lèvres…) pour produire les sons de la manière la plus proche de la « normale ».
L’avis d’un orthophoniste nous permettrait ici un meilleur éclairage.
Merci de votre participation au débat.
Bruxelles, le 14 juin 2022.
Bonjour, Chers Consœurs et Confrères.
Tendez quelque peu l’oreille et l’acoustique vers la superbe journaliste Sophie DAVANT qui, depuis peu, shuinte d’une façon discrète, mais admirable.
A l’oreille, j’en déduirais des D.V.O. et Espace libre légèrement trop généreux.
Il en résulte un suintement phonétique qui crispe les récepteurs des oscilloscopes.
Qui peut légèrement corriger ces écarts de fréquences pour soulager quelque peu les membranes des haut-parleurs ? Merci.
Confraternellment Vôtre !
Guy COTTON, D.G.
Occlusodontologie
Univ. Paris VII, La Garancière
Rue de l’Obus, 141
B-1070 Bruxelles (Anderlecht)
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